Devant la détermination irréversible du mouvement patriotique et nationaliste cabindais vers sa souveraineté totale, devant l’irréfutabilité des arguments évidents présentés pour démontrer, a posteriori et a priori, la véracité de ce fait. Enfin, devant les vents de démocratie et de liberté qui soufflent de par le monde qui ont renversé le cours de l’histoire depuis l’effondrement du mur de Berlin en 1989, et, avec l’éveil fulgurant et fulminant des nationalités en Europe de l’Est hier dans l’orbite de l’ ex-URSS et à l’intérieur même de cette dernière, et plus proche de nous avec l’accession à la souveraineté nationale et internationale de l’Érythrée et du Soudan du Sud, le gouvernement angolais, dans son offensive diplomatique qui vise à effacer de la carte de l’Afrique l’État cabindais, fait appel ou évoque maintenant, son dernier argument pour vouloir justifier son séjour ou son occupation illégale en territoire cabindais – celui de l’intenable micro-état cabindais – un argument d’ailleurs, soulevé par les communistes portugais au lendemain du coup d’État du 25 Avril 1974 au Portugal, sous peur d’être englouti dans la République Démocratique du Congo (RDC), ex- Zaïre ou annexé par le Congo. Par ailleurs, l’actuel Président de l’UNITA, dans sa dernière déclaration sur le futur du Cabinda, est revenu sur l’éventualité d’être annexé par un voisin si jamais l’Angola lâchait prise.
Le présent manifeste n’envisage plus à démontrer la fragilité et le non fondé de cet argument en faisant recours aux arguments d’ordre culturel, sociogéographique ou historique qui per se (d’ eux-mêmes), témoignent déjà largement de la singularité spécifique du territoire cabindais et de son peuple dans l’ensemble du territoire actuel angolais. Ce faisant, notre angle d’attaque suivra le vecteur de la loi internationale des Nations Unies en tant que manifestation des aspirations les plus profondes de l’homme et la vocation actuelle de l’humanité entière vers la démocratie et les réformes internes profondes dans plusieurs États du monde.
1ère Thèse : Du droit international et universel
L’Assemblée Générale des Nations Unies dans la Déclaration sur la concession de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux adoptée le 14 Décembre 1960, précise, nous citons : « Persuadée que le processus de libération est irrésistible et irréversible et que, afin d’éviter des crises graves, il convient d’en finir avec le colonialisme et avec toutes les formes de ségrégation et de discrimination qui l’accompagnent », il est évident par voie de conséquence, que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est un droit sacré inviolable et inaliénable.
Dans la même déclaration, l’Assemblée Générale en exprimant la foi des peuples du monde aux droits fondamentaux de l’homme, à la dignité et valeur de la personne humaine et à l’égalité de droits des hommes et des femmes, l’exprime également et sans discrimination pour les nations grandes et petites.
À la lumière donc, de la déclaration ci-haut citée l’argument ou le concept de micro-état perd son droit de cité et on ne peut pas continuer à sacrifier les aspirations de tout un peuple et à conditionner son autodétermination par le simple fait de sa petitesse.
Par ailleurs, le Cabinda, comme toute autre nation grande ou petite, réunit les trois éléments de base d’un État à savoir : le territoire, la population (avec son unité historique, linguistique et culturelle) et la reconnaissance.
Quant aux deux premiers éléments, le territoire du Cabinda, qu’il s’agisse de son étendue territoriale ou de sa densité populeuse n’est nullement le plus petit ou le moins peuplé parmi les États du monde indépendants ou encore en lutte. Selon les dernières statistiques, la population actuelle est estimée à 800 mille habitants et en 2025 elle sera d’un million (1.000.000) d’habitants.
En ce qui concerne le troisième élément, la reconnaissance, il fera l’objet de la deuxième thèse car, non seulement dans le contexte géopolitique, stratégique et diplomatique actuel, il ne s’agit plus d’une reconnaissance déclarative comme l’ont fait hier plusieurs États du monde, surtout les voisins les plus directs du Cabinda, mais il nous permettra aussi de bannir le fondement du paternalisme et du protectionnisme angolais assis sur les rumeurs d’après lesquelles la R.D.C. et le Congo et sûrement le Gabon, si ce dernier État était frontalier direct du Cabinda , convoitent le Cabinda.
2ème Thèse : de la reconnaissance de l’État du Cabinda
Reconnaître à un peuple son droit à l’auto-détermination, c’est reconnaître de manière implicite l’indépendance de son territoire. Or, dès les premières heures qui suivirent la Révolution portugaise de 1974, le droit à l’auto-détermination et à l’indépendance du peuple cabindais fut reconnu par plusieurs pays africains, européens et américains. Parmi lesquels nous citerons, à titre d’exemple, le Portugal, ancienne puissance coloniale, la République du Congo et l’ex-Zaïre, l’actuelle RD.C., pays frontaliers du Cabinda, le Gabon, l’Ouganda, la France, Le Sénégal, La Côte d’Ivoire, les États-Unis, voire la Chine…
Qu’il s’agisse du Congo et de la R.D.C., dans la mesure où ces deux pays frères se sont prononcés ouvertement devant leurs peuples, partis et gouvernements respectifs de l’époque, devant l’histoire et l’humanité toute entière pour l’auto-détermination du territoire du Cabinda, il serait donc contradictoire et même condamnable que ces mêmes pays aient encore des ambitions d’engloutir, d’annexer ou de partager le Cabinda comme le prétend le paternalisme angolais.
Nous pensons que la coexistence pacifique entre les États et Nations du monde est possible grâce non seulement à l’aspiration intrinsèque de l’homme à la paix, mais également aux traités de coopérations multiformes qui justifient l’interdépendance entre États, petits ou grands. Ce qui vient d’être dit est largement suffisant pour évincer l’argument avancé par le Gouvernement de Luanda selon lequel aussitôt qu’il lâcherait la pomme, elle serait aussitôt avalée ou par la R.D.C. ou par le Congo ou alors, partagée entre les deux. Nous déblayons également par là le point de vue de l’Unita qui prétend que le Cabinda une fois indépendant perdrait l’héritage colonial, notamment la langue portugaise. À ce sujet, il faut dire que même s’il faut admettre avec réalisme socio-politique bien sûr, (situation géopolitique oblige) – le dualisme linguistique dans un État indépendant cabindais, il faut le reconnaître également avec réalisme socio-culturel que les lusophones constituent une majorité sociologique cohérente impossible d’être écrasée ou noyée. En plus, il faut remarquer que l’Identité Culturelle est une réalité-force ayant des origines séculaires et par ce fait même, ineffaçable avec le temps et avec les influences extérieures. Avec cette réalité, nous abordons la troisième thèse.
3ème Thèse : de l’éveil des nationalités et des mouvements démocratiques
L’éveil des nationalismes et des mouvements démocratiques est une réalité irréfutable et évidente de nos jours qu’il soit en Afrique et surtout en Europe Occidentale et Europe de l’Est hier sous la protection surveillée de l’Union soviétique. Le dénominateur commun est que cet éveil trouve ses racines socio-historiques dans la Culture.
À ce propos, personne ne mettra en doute l’existence de l’Identité Culturelle singulière du peuple cabindais déjà même à l’intérieur de l’Ancien Royaume du Kongo duquel il s’est séparé depuis le XVème siècle.
Au fond et en définitive, nous dirons que si d’une part le peuple nationaliste cabindais est pleinement conscient du fait qu’il ne manque pas de ressources et de potentialités humaines et naturelles pour s’auto-gérer, d’autre part, il n’ignore pas que la vocation actuelle de l’humanité est orientée vers les grands ensembles. Néanmoins, la question des nationalités reste vivante et actuelle. Telle est la leçon qui nous vient, non seulement des pays de l’Est qui, pendant cinquante ans étaient sous l’orbite de l’URSS, mais aussi et surtout de certaines républiques même de l’État soviétique.
Le peuple Cabindais ne refuse pas de faire partie du grand ensemble angolais. Mais, il pense que le processus qui l’a intégré dans la famille angolaise est à revoir. Un processus à revoir. Un processus à revoir, car il constitue une démarche que le peuple du Cabinda doit entreprendre librement et de manière souveraine. A lui seul revient, en principe le plein droit de choisir les formes, les modalités et les limites de l’appartenance à la grande famille sous-régionale angolaise. Et cela, pour plusieurs raisons : d’abord, le peuple cabindais possède un territoire autre que celui d’Angola. Il a enfin une Culture, une Histoire et une Identité qui lui sont propres.
Ce faisant, le peuple cabindais ne peut pas adhérer à la famille angolaise tant qu’il continuera à dépendre en tout de l’Angola même si l’économie angolaise est soutenue par le pétrole du Cabinda. Il y a donc un rapport de dominant-dominé, de maître et de l’esclave ou alors que l’esclave se libère avant d’envisager toute forme de cohabitation équitable et durable. C’est une démarche à entreprendre dans l’immédiat. Car, elle permettra d’un côté de cicatriser toutes les blessures issues du conflit angolo-cabindais d’autre part, elle garantira non seulement la reconnaissance et le respect de l’Identité cabindaise, mais aussi la protection et la consolidation des intérêts socio-économiques de l’Angola en particulier et ceux de la Sous-Région, du Continent et du Monde en général.
Voila pourquoi, en mot de conclusion nous profitons de cette occasion pour lancer un appel Fraternel et Pacifique au Gouvernement angolais et au Parti MPLA, aux Partis de l’opposition angolaise, à la Société Civile angolaise et à l’Opinion Internationale afin d’aider les deux parties à se retrouver autour d’une table ronde, répondant ainsi et objectivement aux propositions et aux appels à la paix de la partie cabindaise en vue d’une solution définitive, consensuelle et durable du conflit angolo-cabindais pour une réelle détente, sérénité et développement de notre Sous-Région d’Afrique Centrale.
Par : BIKO RUBRO